Premier jet du texte sur la synthèse du son AB. Il manque encore les références (je les ai notées sur papier pour l'instant), des caps et photos, et quelques exmeples de plus. Episode I : il y a bien longtemps, dans une galaxie pas si lointaine… Si l’origine de la sitcom en tant que genre (d’abord radiophonique, puis télévisé) ne date pas d’hier (1946 pour les premières sitcoms à la télé américaine), le croisement entre musique et sitcoms, aujourd’hui si courant, est loin d’être établi dans les années précédent l’odyssée d’AB. Débutée en 1966, la diffusion des « Monkees » fait figure d’exception. Selon la légende, c’est après le visionnage du film
A hard day’s night des Beatles que des producteurs de la NBC eurent l’idée de créer une série télévisée centrée autour d’un groupe de pop, les fameux
Monkees recrutés et assemblés en ce but. Au début de la diffusion de la série, les 4 membres du groupe se contentaient de chanter (seuls deux d’entre eux savaient jouer d’un instrument) et n’avaient aucune mainmise sur le répertoire du groupe (cela changera suite aux pressions exercées par les musiciens). Le show télé fit des records d’audience, et les albums tirés de la série furent des cartons au hit-parade, rapportant des sommes colossales aux Labels Colombia et RCA (RCA étant la maison mère de NBC). Nous sommes ici face au premier cas d’utilisation de la sitcom pour la promotion de musique par l’intermédiaire des acteurs. Ceci dit, le cas des Monkees est une exception.
Exception parce qu’à l’époque, le croisement se faisait en sens inverse : ce sont les musiciens, qui, une fois devenus des célébrités, deviennent acteurs (et le plus souvent au cinéma). Le King Elvis bat tous les records en ce domaine, mais il n’est pas le seul et dans tous les pays, les gloires du rock n'roll et de la pop connaissent pour beaucoup d’entre elles le passage derrière la caméra. Mais toujours pour du cinéma, et non des sitcoms.
Exception parce que les acteurs de sitcoms ayant fait carrière dans la musique avaient systématiquement une carrière musicale antérieure. Certains cas sont restés célèbres. Le fameux Robert Conrad était musicien avant d’être engagé pour jouer dans «
Hawaiian Eye », puis dans « les mystères de l’ouest », et se servit de cette notoriété pour donner plus d’exposition à sa carrière musicale (il alla même jusqu’à chanter dans un épisode de
Hawaiian Eye, et dans la BO). De même, «
Wonder Woman » Lynda Carter avait un groupe (
The Garfin Gathering), qu’elle quitta par lassitude des tournées, avant de se recycler dans les concours de beauté puis de manier le lasso magique. Une fois sa notoriété acquise avec
Wonder Woman, elle en profita bien entendu pour sortir quelques disques. C’était une époque où les acteurs de sitcoms, une fois leur série terminée et ne pouvant se recaser dans une autre, se recyclaient en animateurs, en producteurs, les plus doués se lançant avec succès dans le cinéma ou les spectacles (Las Vegas, Broadway), parfois devenaient auteurs de livres (qui ne furent pas des best-sellers). Mais dans les cas où on observe une reconversion dans la musique (ou une carrière musicale en parallèle de la série), il y avait bel et bien une carrière musicale antérieure au passage sitcom.
Enfin, il convient maintenant de présenter l’Empereur Palpatine de notre histoire :
Disney. La célèbre maison avait déjà manifesté son goût pour la musique par l’intermédiaire de ses films et dessins animés en musique, contenant ou soit un fond sonore ou bien des chansons écrites pour le film. Walt Disney alla même jusqu’à placer la musique au premier plan dans «
Fantasia » (1940). Disney avait déjà sorti des disques (sur RCA) incluant les chansons ou les musiques employées pour ses films, et décida en 1956 de créer son propre label, Disneyland Records. En sortant en disque, avec succès, la musique d’
Alice (avec les 3 chansons de l’héroïne chantées par Darlene Gillespie), Disney tressa un pont solide entre cinéma et disques assortis, les deux éléments étant gérés par la même société. Ce fut également dans les années 50 qu’apparut une émission télévisée dont on reparlera dans l’épisode III : Le
Mickey Mouse Club. Emission à destination d’un jeune public, elle incluait dessins animés, sketches, conseils de morale, et était présentée par les «
Mousketeers », une troupe composée d’adultes et d’enfants ou d’adolescents. La mousketeer Darlene Gillespie enregistra les chansons d’
Alice, de la
Belle au bois dormant, ainsi qu’un album de reprises de standards du rock n roll. On trouve ici un nouveau pont : celui entre la présentation d’une émission pour la jeunesse et la promotion de musique. Mais retenons qu’il ne s’agit pas encore, pour l’instant, de sitcoms. De plus, l’affreux Palpatine ne disposait pas encore de son Etoile Noire : j’ai nommé
Disney Channel.
Episode II : Un nouvel espoirC’est en l’an de grâce 1977 qu’est créée, par Jean-Luc Azoulay er Claude Berda, la société
AB productions. AB, à la base, est une société ayant pour but de produire des disques et des spectacles, et non des émissions télévisées. C’est un fait important à retenir, car le passé des deux créateurs dans le milieu musical (JLA a été assistant de Sylvie Vartan, et Berda a repris à la suite de son père la gestion de la ligne de vêtements de cette même Sylvie Vartan) va être déterminant pour la gestion du business de AB a l’époque de sa gloire télévisuelle. Même si le premier grand succès AB est l’adaptation disco du
Mustapha de Bob Azzram, le second se fait avec le récit du
Petit Prince par Jean Marais : c’est certainement à partir de là que la maison va choisir la jeunesse comme cœur de cible. Si plusieurs disques pour la jeunesse ont été sortis par AB avant 1978 (il est difficile d’en retrouver la trace), c’est définitivement en cette année 1978 que le destin de AB va changer : c’est la rencontre entre maître Yodazoulay et
Leïa Dorothée.
Dorothée n’est pas une inconnue en 1978 : c’est une actrice de théâtre reconnue, elle a été formée à la danse, au piano, et est une passionnée de musique et de rock n’roll en particulier. De plus, elle a déjà la présentation de plusieurs émissions pour la jeunesse à son palmarès (
Les mercredis de la jeunesse,
Dorothée et ses amis) et vient d’être choisie pour animer
Récré A2, émission culte qui va se prolonger jusqu’en 1987 et dans laquelle elle rencontre ses futurs collaborateurs du
Club Dorothée (Arianne, Jacky, Corbier…). Le premier fruit de la rencontre entre Dorothée et AB est le conte musical
Dorothée au pays des chansons. Le premier d’une longue série…
A partir de ce succès, les sorties de disques et de comédies musicales crées par AB s’enchaînent avec un succès de plus en plus marqué : Dorothée est la poule aux œufs d’or pour AB, et la jeunesse est confirmée en tant que cœur de cible. A cette époque, si AB se concentre sur son activité prioritaire (musique et spectacle), la société a déjà un pied dans le PAF de par cette collaboration forte avec la présentatrice vedette de Récré A2, une amitié dont AB saura bientôt profiter. En attendant, JLA et Berda étendent leur catalogue avec le recrutement et la promotion d’Emmanuelle Mottaz. Le premier album de cette jeune chanteuse,
Premiers Baisers, est un succès, et la chanson du même nom est un tube en 1986. La sortie de son second album, en 1987, est un succès mitigé : le premier single extrait est un tube (
Rien que toi pour m’endormir), mais l’album lui-même es vend moins bien que son prédécesseur. Certains critiques notent déjà des redondances dans les mélodies et dans les structures des chansons, la même critique étant formulée à l’égard de Dorothée pour l’album
Docteur sortie la même année. Cette remarque sur la redondance (que l’on appellera par la suite « auto-pompage ») des chansons crées par le duo Porry (alias JLA) / Salesses pour leurs artistes maison va devenir récurrente lorsque la machine à tubes tournera à plein régime (années 92-95).
Cette année 1987 voit surtout la création du
Club Dorothée : la première a lieu le 2 septembre 1987, l’une des dates sacrées du calendrier Sitcomologique. Désormais, AB productions a les deux pieds dans le PAF, et maître Yodazoulay est prêt à conquérir la galaxie. Pour cela il se dote d’une arme fatale : la sitcom.
Le genre a déjà été exploité en France. Diffusée dès 1984,
Maguy est la mère de la sitcom à la française, elle possède tous les codes (durée de 20-30 min, cadre de la famille ou du groupe d’amis, quasi unicité des lieux, décors intérieurs…), mais elle n’est pas destinée à la jeunesse. Dans le cadre du Club Dorothée, AB crée sa première sitcom :
Pas de pitié pour les croissants. Même si sa destination au jeune public peut prêter à débat (les blagues ne sont pas forcément compréhensibles pour de jeunes enfants, les scénarios sont pour le moins loufoques, il n’y a pas de recherche d’identification du public aux personnages de la série), elle est à marquer d’une pierre blanche dans l’édifice qu’est en train de construire AB, et ce pour 3 raisons :
- Elle est diffusée dans une émission destinée à la jeunesse
- Elle est au format sitcom
- Elle met en scène des chanteurs AB (Dorothée, Corbier) et des animateurs
La présence des chanteurs Dorothée et Corbier suit alors le « principe d’antériorité » de la carrière musicale par rapport à la TV : Dorothée et Corbier avaient une carrière musicale avant la série télévisée. Ceci dit, cette première sitcom est l’ultime étape avant l’une des innovations majeures apportées par AB : le passage quasi systématique des acteurs de sitcoms derrière le micro…
Episode III : Disney Channel , la menace fantôme. Dans les univers croisés de la musique et de la série télévisée, aucune innovation majeure ne pointe le bout de son nez dans les années 70 et le début des années 80. La majorité des acteurs de série télévisée qui se lancent dans la chanson avaient déjà une carrière musicale avant leur célébrité télévisuelle : c’est par exemple le cas du chanteur country Tom Wopat (le célèbre Luke Duke de
Shériff fais moi peur), même si la série a bien évidemment boosté sa carrière musicale. Quelques exceptions sont à noter : la plus fameuse d’entre elles (les exceptions , je précise, car le monsieur dispose quand même d’un torse particulièrement velu) est David Hasselhoff. Même s’il avait confié rêver de chanter, il n’avait pas mis ce projet en application avant que le succès de
K2000 lui permette de se lancer. Du coup, Hasselhoff, star de K2000, fit consécutivement à la série un tube avec
Looking for Freedom en 1989 (qu’il chanta juché sur le mur de Berlin, on a la classe ou on l’a pas), puis se reconvertit en acteur et producteur d’
Alerte à Malibu, devenant pour tous ces faits d’armes un héros aux USA qui pourrait être comparé ici à notre Dieu Rippert, mais en plus boeauf (ce qui est normal pour des téléspectateurs ayant la mentalité et le comportement d’un Al Bundy). Mais vous l’aurez remarqué, il s’agit encore de séries télévisées et non de sitcoms. Au début des années 90, même les sitcoms respectent encore la loi d’antériorité : Will Smith avait déjà sorti un disque en tant que MC avant de participer au
Prince de Bel-Air.
Par contre, une création diabolique pointe le bout de son nez en ce début des 80’s : Palpatine a achevé la construction de son étoile de la mort : Disney Channel est lancée à la télé américaine en 1983. La boucle est bouclée : la société Disney comporte tous les ingrédients du succès (une société de création de films et de séries, une maison de disques, une chaîne télévisée). Profitant de sa capacité à émettre en continu, la nouvelle chaîne, outre la diffusion de séries animées, réactive ce qui fut l’une des recettes du succès de Disney à la TV : les émissions et séries pour la jeunesse, présentées et interprétées par des jeunes.
C’est d’abord «
Kids Incorporated » : une série traitant d’un groupe de rock formé par des adolescents. Cette série n’est pas une sitcom, et fait parfois appel a des éléments surnaturels (robots, princesses digne du médiéval-fantastique, etc). Les acteurs n’hésitent pas non plus à pousser la chansonnette dans la série, en dehors des performances du groupe, ce qui donne un léger aspect « comédie musicale filmée » (on peut alors la considérer comme un ancêtre des
High School Musical). La série a compté la présence de plusieurs futures stars qui ont ensuite donné dans la musique : Stacy Ferguson (la future Fergie), et Jennifer Love Hewitt (qui a eu une courte carrière musicale). Aucune des deux n’a sorti de disques durant son époque Disney (même l’album de Hewitt,
Love songs, de 1992, alors qu’elle travaillait encore pour Disney, est sorti seulement au Japon et sur une autre maison de disques).
Ensuite, c’est la renaissance du
Mickey Mouse Club en 1989. La collection de noms des
Mousketeers de la période 1989-1994 a de quoi faire frémir : Justin Timberlake, Ryan Gossling, Britney Spears, Keri Russel, JC Chasey, Christina Aguilera (saurez-vous trouver qui a ensuite entrepris une carrière dans la musique ?). La célèbre condition d’antériorité s’applique pour certains (Spears et Aguilera notamment), mais surtout il y a encore un point commun : aucun de ces futurs grands noms de la musique internationale n’a sorti d’album, ni même un single, pour Disney a l’époque. A l’exception de Christina Aguilera, qui après l’arrêt de l’émission, revint vers Disney pour participer à la BO de
Mulan et ainsi lancer sa carrière, aucun n’a plus été sous contrat avec Disney ni n’a employé sa notoriété de l’époque comme argument pour lancer sa carrière musicale. Et pourtant, l’émission comprenait des numéros chantés et des sketches.
Il faut aussi citer le cas, en France, des "ambassadrices Disney" (Douchka, puis Anne) ayant cartonné au hit-parade, présenté des émissions pour Disney... Mais pas de sitcoms à l'horizon !
La maison Disney fut certes une pépinière de futures stars à cette époque, mais cela prouve qu’elle était peut-être, comme l’aurait dit maître Yodazoulay, trop attentive au futur au détriment du présent. C’est là qu’on reconnaît la sagesse des grands maîtres.
Episode IV : L’empire AB contre-attaqueLa maîtrise de JLA ne fait, à la même époque, aucun doute.
Première offensive : les dessins animés diffusés par le Club Dorothée. Adapter le générique d’un dessin animé dans la langue du pays de diffusion est une tradition de longue date, mais là où la maîtrise de JLA s’exprime pleinement, c’est dans sa manière de saisir cette opportunité pour faire des génériques des succès du disque. Pour cela, grâce au lien unissant AB et le Club Do, la création des génériques des dessins animés est accaparée par AB. JLA (alias Porry) écrit les paroles, Gerard Salesses se charge de la musique, et les chanteurs maisons (Bernard Minet, Arianne) se chargent de les interpréter. Ce qui entraîne une sorte d’unité, de fusion entre les animés, leurs génériques, et le Club Do et ses animateurs, sous l’ombre de JLA. Quasiment tous les génériques sortis à cette époque, qu’ils l’aient été en 45 tous ou en compilations, ont cartonné dans les ventes. Et leur succès ne se dément toujours pas plus de 20 ans après : peu de pays vénèrent autant que la France les génériques de leurs dessins animés de jeunesse, y consacrent des sites internet, des soirées en boîte de nuit, des débats.
Seconde offensive, celle de plus grande envergure : faire chanter les comédiens des sitcoms AB. L’idée n’est sûrement pas tombée du ciel un beau matin. En arriver là s’est fait progressivement : la passion de AB pour les disques (à l’origine de la création de la société), le recentrage sur la jeunesse, la diffusion de musique pour la jeunesse, la création de sitcoms, puis l’intégration de chanteurs dans une sitcom. Voilà les étapes qui ont conduit à cette offensive :
Premier Baisers, diffusée à partir de décembre 1991, est la première des sitcoms AB à viser un public jeune à travers la reproduction de leur univers : le lycée, les copains, la famille. La série devient un succès, les comédiens deviennent des stars, le tout relayé par les émissions du Club Do qui invitent lesdites stars sur leur plateau, et une presse à destination de la jeunesse qui encense et promeut à satiété les nouvelles égéries AB.
Premiers Baisers porte bien son nom : c’est la première sitcom à succès de AB. Et Christophe Rippert, sera son premier chanteur à succès. Pour plus de renseignements sur la musique de Christophe, se reporter aux articles consacrés sur le blog de la sitcomologie. Après le succès des génériques, l’
amour de vacances de Rippert est le premier inceste officiel entre sitcom et univers de la musique.
JLA veille alors sur cette nouvelle poule aux œufs d’or avec la vigilance d’un dragon. Comme il écrit les scénarios de ses sitcoms, il décide également des contours de l’œuvre musicale de ses protégés. Et pas question de moufter, les tentatives de rébellion étant matées manu militari (Rippert se souviendra ici de l’exil forcé de son personnage en Finlande pour le punir de son insurrection musicale). Après cette punition, les autres aspirants chanteurs ne s’y frottent pas : Remblier décide de se passer des services de JLA pour aller fonder
Sign Here en cachette (se reporter à la biographie de Fabien sur le blog). En ce début d’années 90, maître Yodazoulay dispose de tous les atouts pour régner sans partage :
- L’idée originelle, celle de faire chanter ses acteurs de sitcoms
- Un matériel promotionnel inféodé (Club Do, presse)
- Un compositeur capable de pondre des chansons à la douzaine (Salesses)
- Un réservoir quasi-inépuisable d’acteurs à faire chanter
Nous sommes alors en route pour l’épisode V de la saga du son AB…
Episode V : l’attaque des clones (musicaux)Comme ceux qui ont le flingue chargé et ceux qui creusent, le monde des chanteurs issus des sitcoms AB peut se séparer en deux catégories :
- Ceux qui ont un univers bien à eux et ont l’ait impliqués dans leur musique
- Ceux qui sortent du même moule (les fameux clones)
Dans la première catégorie, on trouve les fortes têtes, en premier lieu Rippert et Remblier. Remblier est un cas particulier, car il a déserté la maison AB pour faire sa musique, et cette musique n’est pas sortie à l’époque. Mais c’est le signe des fortes têtes. Quand à Rippert, comme le prouve son premier coup de gueule visant à s’impliquer musicalement dans son œuvre, il donne l’impression de choisir (un minimum) ce dans quoi il s’engage et ce qu’il chante. Son célèbre tube,
Un amour de vacances, ainsi que nombre de chansons, ne portent pas la marque des boîtes à rythmes et des claviers kitsch tout droit sortis des années 80, dont les productions de Dorothée et de certaines autres stars AB sont noyées. La douce ballade sur l’amour de vacances, bien que passant pour une rengaine, sonne plus « crooner » et moins variété Bananaramesque.
Le cas de Dupray est un peu à part. Comme Remblier, c’est un fan de rock. Même si Dupray a sorti, lui, des disques chez AB, la sonorité plus rock (voire rockabilly) de certaines chansons, ainsi que son look (il ne lui manquerait plus qu’une banane à la Margerin) tranchent avec ses confrères. Il faut peut être y voir là l’influence d’Arianne et de Rémy des Musclés, qui l’ont pris sous son aile, et ainsi écarté des titres à la chaîne de Salesses.
Il convient également de mentionner le cas des jumelles Ever, qui chantaient avant de débarquer dans Premiers Baisers, et dont la musique (pas écrite par Porry/Salesses) et le look coloré semblaient dans une dimension totalement parallèle à l’univers de la musique AB.
On peut aussi remarquer que comme ans le cas de leurs personnages de sitcom, qui sont censés, selon l’étiquette azouléenne, coller un peu et s’inspirer du caractère de leurs interprètes, il en va de même avec leur musique : celle de Rippert se prête à son caractère de tombeur romantique, celle de Dupray va avec le caractère teigneux d’Anthony.
En ce qui concerne la seconde catégorie, elle regroupe les acteurs et actrices que JLA a plongé dans le grand bain musical alors qu’ils/elles ne s’étaient à priori pas proposé pour le faire, et ceux/celles qui ont totalement légué leur avenir musical au duo Porry/Salesses.
Il y a les cas de Camille Raymond, Mallaury Nataf, Julie Caignault, Manuela Lopez : La proposition de chanter vient de JLA (même si Caignault a un peu insisté, parlant dans la presse de ses cours de chant et de son écriture de textes). On entre alors dans la production à la douzaine de Salesses, et le fameux auto-pompage tourne à plein régime : même sons synthétique, même boîte à rythme, même façon de traiter les voix, même thèmes des paroles (
comme un amour d’été = un amour de vacances), parfois même mélodie (
les filles c’est très compliqué = au bar de Jess). En conséquence, ces chansons ont plus ou moins bien marché, mais n’ont pas débouché sur un album et encore moins sur la poursuite d’une carrière dans la musique (malgré le fait que ces chanteuses en herbe s’avouaient dans les interviews une passion pour la musique).
Bien entendu, Hélène Rollès restera pour l’histoire la chanteuse emblématique des années AB. Chanteuse et musicienne avant qu’on le lui propose de le faire dans une sitcom, ses premiers pas musicaux dans le giron AB sont dominés, tant dans la musique que les paroles, par le duo Porry/Salesses, qui, ayant remarqué puis confirmé le succès de la chanteuse, ne la lâcheront plus jusqu’à ce qu’elle finisse par décider, elle-même, de prendre sa musique en mains (mais ce fut après la période dorée de AB).
Et enfin, il existe une troisième catégorie : celles des inclassables :
- Les anciennes gloires de AB : JLA est un ami fidèle, et bien entendu, ne s’est pas résolu à lâcher une Dorothée qui a bâti le succès de la maison avec ses disques, ni une Emmanuelle Mottaz. Porry et Salesses ont continué à écrire pour Dorothée et à sortir régulièrement ses disques. Quand à Mottaz, qui a voulu s’écarter de ses premiers émois vinyliques qu’elle trouvait niais (à raison), et à décider de se fonder un univers musical plus sexy, provocant, et personnel, JLA, voyant que cela ne cadrait pas avec le reste de l’univers AB, a fondé un label bien spécial (Stiger Records) pour continuer à éditer ses disques.
- Les Musclés : ils méritent bien un paragraphe. Formés de musiciens chevronnés, ayant bossé dans le milieu et pour certains fait des études musicales, le groupe, à l’écart des comédiens-chanteurs de AB, est le véritable défouloir de JLA. Avec d’un côté un répertoire paillard, digne des Licence IV, qui chante les filles et le sexe, la fête et l’alcool, voire les substances illicites (les pilules de mademoiselle Antonin). Les Musclés y cultivent le culte des fêtes rurales dans cette bonne vieille campagne française, un côté franchouillard et débonnaire à grand renfort d’accordéon et de barbecue. Et puis avec également des piques bien senties sur ceux qui critiquent JLA : les médias (la valse des…), Antoine de Caunes (Antoine Daicône), les émissions concurrentes au Club Do (Marotte et Charlie) ; ainsi que des clins d’œil aux phénomènes sociaux de l’époque : les tubes de l’été (La musclada), le rap (le rap des musclés), la techno (La pecno musique). Aurait-on vu Camille Raymond chanter Antoine Daicône ? Non, et c’est bien pour cela que l’univers des Musclés est essentiel, par son côté grivois, parfois critique parfois débonnaire, à la maison AB et à JLA en particulier…
Mais même si l’on voit la machine AB tourner à plein régime, on ne peut finalement pas imaginer que la recette teindra une décénie entière. A la fin des années 90, le moteur commence à se gripper, et la fin de la saga musicale approche…
Episode VI : La revanche d’M6Les Boys Band, importés des USA (
New Kids on the Block) et d’Angleterre (
Worlds Appart, Take That, East 17) deviennent les nouveaux chouchous des ados. Immédiatement, la machine médiatique embraye sur le phénomène, toutes les maisons de disques veulent leur Boys Band. AB et ses comédiens chanteurs semblent dépassés. Mais c’est sans compter la vista de JLA, qui parvient à récupérer les 2be3 et à les intégrer à une…sitcom (c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleurs soupes). Cet acte de bravoure sera le chant du cygne de la dominance de AB, et sur la TV, et dans le domaine de la musique pour ados friands de sitcoms. Ce sera d’abord les boys band, puis ensuite l’invasion des lolitas américaines, puis le RnB… AB, sous contrat avec TF1 pour la diffusion et la programmation de ses programmes musicaux, perd son angle d’attaque avec la fin du Club Do. M6, la petite chaîne qui monte, devient la seule du PAF a diffuser de longues émissions musicales, des heures de clips et d’émission aguicheuses (Fan de en est le meilleur exemple). Elle se permet, outrage ultime, de créer ses propres M6 awards. La domination musicale de AB, via TF1, est finie. C’est d’abord M6 qui lui dame le pion, puis les chaînes câblées qui deviennent de plus en plus populaires (MCM, MTV). Les OK et autres Star Club se sont, eux, trouvés de nouvelles idoles….
Que reste-t-il aujourd’hui de l’épopée du son AB ? Des chansons inoubliables, que ce soit les génériques TV, les chansons des Musclés, celles de Dorothée, ou certaines de celles issues des sitcoms. Et aussi certains comédiens, qui continuent leur carrière musicale avec certes moins de succès et d’omniprésence médiatique qu’à l’époque. Où l’on voit que ce sont ceux qui ont sans doute été, à l’époque, les plus honnêtes vis-à-vis de leur passion pour la musique, qui continuent aujourd’hui d’en jouer et d’en créer : Rippert en fait partie, Hélène aussi, qui, débarrassée des paroles de Porry, se sent libre d’écrire sur le fait de taxer les riches (
Robin des Bois) ou sur le G8 (
Les rois d’aujourd’hui). Au final, maître Yodazoulay peut être fier de ses disciplines.
Quand à Disney Chanel, qu’elle ait ou pas été inspirée par les idées de JLA, elle a commencé, au seuil des années 2000, à produire ses propres sitcoms… dont elle a fait par la suite, ironie du sort, systématiquement chanter ses acteurs. Et pour nous inonder aujourd’hui de Séléna Gomez et autres Vanessa Hudgens, la chaîne mérite bien de s’appeler Palpatine.
PS : pour les réclamations quand à l’utilisation de personnages réels, de personnage fictifs, ou accusations d’usages de stupéfiants de la part de l’auteur de ce texte, veuillez contacter Georges Lucas.