Les sitcoms AB dans la presse des 90's

Citation :

Un après-midi devant les productions d'AB

... «Les filles d'à côté» entretiennent leur forme. Place aux femmes

actives.

KIPA

Tandis que Justine et Annette découvrent l'amour dans «Premiers baisers» ...

Un après-midi devant les productions d'AB Où l'on découvre ce qu'est le véritable amour dans Premiers baisers, la ravis- sante Lola, cheftaine du Miel et les abeilles ou encore Dorothée l'immortelle et ses complices terriblement drôles ... Ou encore: comment les sitcoms d'AB Productions, et les pages de publicité qu'ils attirent, renvoient comme un miroir l'image de la cible qu'ils visent.

Il y a des après-midi comme ça où l'on décide de se faire plaisir. Seul. Face à son poste de télé. Yeux dans le tube cathodique, fixés sur TF1, sans discontinu, les volets fermés, le répondeur branché, la télécommande dans le tiroir du bas, un lait aromatisé avec paille fluo dans une main, le pain brioché à portée de l'autre, le cartable obturant la porte de la chambre. Pas prêt à remuer le genou avant 20 heures. Pas avant d'avoir dépisté les affres tous frais et rigolos des chouettes gars et filles des sitcoms d'AB Productions.

A peine Superboy a-t-il fini de taquiner un ET trognon, et TF1 déverse son Miel et les abeilles, grand cri de ralliement intergénérations, où fifille, papa et grand-mère se taquinent comme des petits fous. En cheftaine de ruche, la brune Lola (Mallaury Nataf, aperçue en blonde sans pantalon dans Newlook), objet du désir des abeilles (les garçons butineurs de la cafét') est transportée par la magnificence rock'n'roll de Johnny, voyou juvénile à la démarche de cow-boy sans monture. Extraordinaire comme tous les rockers se prénomment Johnny, leurs parents sachant vraisemblablement dès l'âge des couches que leur progéniture serait rocker ou ne serait pas. Maman aurait opté pour «Robert», et Johnny aurait été fonctionnaire. Ou tripier.

Dorothée happe l'audience Johnny, il est désopilant, avec ses manières rustiques, sa mine de gamin, sa coupe hirsute, sa manie de qualifier chacun («les nazes», «miss Monde», «mon bébé d'amour»). Et on saisit merveilleusement l'accointance serrée qui lie ces deux-là, malgré les malveillances des abeilles. «Il est complètement fou, et c'est pour ça que je l'aime.» Exquis.

La pub? Elle sautille toutes les demi-heures, les mêmes produits (céréales, serviettes hygiéniques, blocs cuvette, soupes en sachet) intercédant périodiquement, dessinant une cartographie pointue du téléspectateur AB, gamines en fleur et mères de famille en tête. Et puis la fée des loupiots, l'archange d'AB, la potache matriarcale du poste, Dorothée happe l'audience une heure durant dans son Club Dorothée, avec un trio américain (Arnold et Willy, Punky Brewster, Parker Lewis), un trio poilant d'animateurs lumineux (Jacky, Corbier et Patrick) et un tombereau de gratifications stimulantes. Sébastien a adressé sa missive trognon au pays de Dorothée? Monsieur Cadeaux lui offre «un magnétophone, le magazine Club Dorothée Jeux et Albums CD, avec bien évidemment les paroles des chansons et deux posters.» Sébastien aurait joui de la carte du Club, et la largesse de ses amis cathodiques aurait été encore plus immense. Un disque de Christophe Rippert? Un passe-droit pour admirer Hélène en direct-playback? Plus fort: une invitation pour le pays de Dorothée, là où les enfants naissent dans les choux? Et n'ome- ttez point de «voter pour le super grand jeu d'Hélène».

Une bande de jeunes qui rigolent Une bande-annonce pour le show de la blonde timorée en veste en jeans cloutée, et Premiers baisers débute le carrousel de turpitudes sentimentales, vives et légères, de Justine et Annette, celle au timbre fluet, celle qui trouve l'amour «bizarre. Depuis que je suis avec Joël, je n'ai pas écouté un seul disque de Roch Voisine». Vu les liens étroits existant entre l'hockeyeur viril et TF1, on saisit que la blague relève du clin d'oeil amical. La télé, c'est vraiment une bande de jeunes qui rigolent. François, lui, est vraiment l'idiot qui n'arrive pas à harponner une seul belle. Mais c'est normal, il a des lunettes. Fallait pas naître myope. «Gagnez en exclusivité la carte téléphonique dédicacée par Surya Bonaly sur le 36-15 TF1», annonce une bande déroulante. Une ritournelle dans le salon, une autre dans la cuisine, et déjà les sobriquets et les lieux se mélangent dans l'esprit de l'ABéphile, comme si le miel coulait durant le premier baiser, les abeilles butinaient Annette, Dorothée roucoulait avec le papa de Lola et personne ne gagnait au Club Dorothée. Une gorgée de milk- shake et...

... Les filles d'à côté remuent leurs muscles dans la salle de gym. Fini les ébats pubères, place aux femmes actives. Jambes qui se dévoilent, jupes qui se raccourcissent, décolletés qui se font pigeonnant, sens qui s'exacerbent. Du sexe? Non, on le subodore. Et c'est déjà énorme.

«J'ai invité Xavier à dîner, susurre une blonde en maillot. Au hors-d'oeuvre je lui ai fait du pied; au plat de résistance je l'ai embrassé; au dessert, il m'a pris dans son lit. Les garçons adorent qu'on fasse le premier pas.» Exact. Et le public? Plus mûr, à la vue des pubs adjacentes (crème antiacnée, crème hydratante, crème à déguster).

Fin. Générique. Voilà donc une belle après-midi, parsemée de gens beaux et blancs, de filles ravissantes, de vieux loufdingues mais drôles, de gros un peu collants mais drôles, de correspondants américains à croquer (tous les corres' sont mignons, de toute façon), sans écoles à fréquenter ou sexe à pratiquer. Va falloir maintenant se remettre à penser. Pas évident. Vraisemblablement un man-que d'entraînement.

Frédéric BENUDIS

« Les Années fac » à l'eau de rose
Article paru dans l'édition du Monde du 03.12.95
Depuis octobre 1995, une nouvelle série d'AB Productions a pris la relève de « Premiers baisers ».

Les mêmes personnages ont juste un peu grandi sans rien perdre de leur indéfectible insouciance

CONÇUE comme la suite de « Premiers baisers », « Les Années fac », diffusée depuis le mois d'octobre 1995, se nourrit de l'air du temps. « Il ne s'agit pas de faire dans le réalisme. Une sitcom n'est pas un documentaire et n'a aucun but pédagogique... c'est d'abord du spectacle, du divertissement. » C'est ainsi que Jean-Luc Azoulay, responsable d'AB Productions avec Claude Berda, définit le concept de la série. On ne saurait mieux dire. Le scénario existe, mais il évolue au gré de l'interprétation des comédiens, qui « ne sont pas des marionnettes, et font régulièrement des propositions pour enrichir l'intrigue », explique Jean-Luc Azoulay, qui est également coscénariste des « Années Fac » (avec Emmanuel Ogouz et Serge Adam). « Cela permet des réajustements constants dans le scénario. C'est la magie de l'écriture. » Une magie qui doit être source d'amusement pour le spectateur. Le résultat : une série dans la lignée des sitcoms (« Hélène et les garçons », « Le Miel et les abeilles » entre autres) qui ont fait le renom d'AB Productions.
Après 317 épisodes, « Premiers baisers » commençait à s'essouffler. La solution ? Prendre les mêmes et recommencer : les personnages, juste plus vieux d'un été, ont passé leur bac, avec ou sans succès ; ce sont maintenant « Les Années fac ». Seuls Justine et Jérôme, pourtant, poursuivent leurs études à l'université. Les autres ? Ils traînent une jeunesse irréelle entre drague, cours de karaté et pots entre copains.

Toujours aussi invraisemblable, cette nouvelle situation permet à l'intrigue de rebondir pour encore vingt-six ou cinquante-deux épisodes. Avec sept ou huit décors, des dialogues simplistes et des bisous presque à chaque minute, l'évolution est à peu près inexistante. Dénuée de tout réalisme, la série se veut authentique dans sa conception des rapports humains amour et amitié exclusivement entre jeunes. Les filles sont hyper-sexy, les garçons virils et fiers d'eux-mêmes. Jolis coeurs et lolitas sont partagés entre jeux de séduction, rivalités masculines ou féminines, mais aussi amitiés plus ou moins indissolubles. « C'est comme dans la vie », explique Jean-Luc Azoulay. Une vie sans chômage, sans facs bondées, sans loyers à payer. Une vie où les doutes de l'existence sont escamotés. A l'heure où l'on fait souvent appel à la solidarité intergénérations, « les adultes sont pratiquement absents, représentés uniquement par le couple Girard, des parents extrêmement compréhensifs, eux-mêmes immatures », remarque Dominique Pasquier, sociologue au CNRS.

Et pourtant, la série est regardée chaque semaine par plus de deux millions de téléspectateurs de quatre ans et plus, soit 35 à 37 % d'audience. « Pour nous, il n'y a qu'un public familial, qui réunit les jeunes, les adultes et les personnes âgées, explique Jean-Luc Azoulay, mais ça marche très bien auprès des dix-quinze ans, et nous atteignons 40 % de part de marché chez les ménagères de moins de cinquante ans », affirme haut et fort le directeur d'AB Productions.

Comme la ménagère de moins de cinquante ans, les adolescents sont aussi une cible privilégiée pour les annonceurs. AB Productions, avec « Hélène et les garçons » et ses autres séries, touchait un public trop jeune, sans réel pouvoir d'achat. « Ainsi, pour faire vieillir l'audience, « Premiers baisers » est devenu « Les Années fac », explique Dominique Pasquier. De plus, la concurrence de séries américaines ou françaises plus proches de la réalité, comme `` Beverly Hills `` ou `` Seconde B ``, a contraint AB Productions à prendre le tournant du réalisme avec `` La Philo selon Philippe ``, ou à sortir de son cadre traditionnel en passant aux `` Années fac `` ». Paradoxalement, si les ados, les vrais, regardent leurs clones télévisuels, c'est peut-être pour mieux sentir l'épaisseur de leur propre réalité...

ALEXANDRA OUBRIER

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AB Productions lance la sitcom « philo »
Article paru dans l'édition du Monde 17.09.95
La première chaîne se taille un beau succès d'audience avec « La Philo selon Philippe », une série qui reprend les valeurs du « Cercle des poètes disparus », le film culte des ados


Cet été, dans les cabinets ministériels, des conseillers racontaient, non sans une certaine condescendance amusée, que « la moitié des ministres et des députés avaient lu, sur la plage, Paulo Coehlo ». De L'Alchimiste à Sur le bord de la rivière Piedra, je me suis assise et j'ai pleuré, les deux best-sellers de l'auteur brésilien, en passant par Va où ton coeur te porte, de Susanna Tamaro, les meilleures ventes se sont déclinées, cet été, sur le mode d'une pseudo-pensée mâtinée de religiosité et de sagesse populaire, façon new age américain.
La lame « philosophique » vient du fond des années 90. Le Petit Traité des grandes vertus, d'André Comte-Sponville, figure parmi les meilleures ventes d'essais de l'été. Les classiques de la philosophie stoïcienne se vendent depuis quelques années en versions expurgées, colorées, et bon marché. Le cinéma n'est pas en reste, puisqu'il y a cinq ans déjà que Le Cercle des poètes disparus, un hymne à la vie signé Peter Weir, se taillait un peu partout le succès que l'on sait : l'enthousiaste Robin Williams, prof de littérature dans un collège du Vermont, expliquait à ses élèves les manières du « Carpe diem ».

LA CERISE SUR LE GÂTEAU

La télévision a toujours quelques années de retard. Dans son étude détaillée de Mille scénarios, une enquête sur l'imagination en temps de crise (éditions Métaillé), Sabine Chalvon-Demersay, qui a analysé l'ensemble des synopsis écrits en 1991 et 1992 comme autant de « fragments d'une culture commune », montrait que ces fictions mettaient en scène une génération à l'avenir incertain, qui ne s'accordait plus la satisfaction de l'hédonisme (Le Monde du 25 février 1994). AB Productions, qui n'est jamais en reste pour coller aux désirs du plus large public et sait réagir très vite aux attentes des téléspectateurs un épisode tourné par jour propose, en cette rentrée, une sitcom au titre inattendu : « La Philo selon Philippe ». Les premiers épisodes se sont déjà taillé quelques remarquables succès d'audience (entre 37 % et 40 % de parts de marché en fin d'après-midi).

L'idée « originale » vient de Jean-François Porry, pseudonyme usuel de Jean-Luc Azoulay, fondateur, avec Claude Berda, d'AB Productions. Un lycée. Une classe de terminale. Des élèves garçons en jeans, chemise à carreaux à l'américaine, filles belles et très maquillées. On se raconte les dernières blagues télévisées des « Nuls » et des livres d'Arthur (« Ta mère est tellement plate qu'on peut la faxer »). Et puis, cerise sur le gâteau, un nouveau prof de philo, Philippe (Yannick Debain), qui ressemble à tout sauf à un prof, « surtout de philo ».

C'est la nouveauté de la série, qui calque à la fois l'univers scolaire plus réaliste de « Seconde B » (une production Flash Films), diffusé le mercredi par France 2 (les cours qu'on sèche, l'échec scolaire de Bernadette qui a quitté l'école et vend des chaussures, l'alcoolisme des moins de trente ans) et l'univers traditionnellement plus étriqué, « ringard » et réactionnaire, des séries « collège » d'AB Productions : les élèves parlent étrangement de cours « barbants », trinquent leurs « verres de soda » et se moquent des « pédés » le tout suspendu dans un « nulle part télévisuel » cantonné à une demi-douzaine de lieux de tournage, dont l'inévitable « cafét' ». Jamais, dans une série d'AB Productions, on n'avait vu un personnage comme Philippe, jeune premier qui fait sa rentrée dans l'univers enseignant, plein d'idées sur la vie, la discipline, l'éducation, l'amour, et curieusement fermé aux traditionnels babillages sur les filles et désordres amoureux afférents.

D'où l'intérêt. Les couleurs restent crues, mais les dialogues, casting oblige, prennent forcément un peu de hauteur. Les profs de philo, c'est bien connu, apprécient autant « la beauté intérieure » que celle, plus spectaculaire, des mannequins d'AB Productions. Avec Philippe, on s'interroge au tableau noir : « La pensée est-elle plus forte que l'acte ? ». Au début, les filles répondent, en gloussant, que « ça dépend du garçon ». Mais, petit à petit, chacun s'intéresse à ce prof décidément « cool », mixte de « Travolta et de Tom Cruise », pour qui « le respect et la discipline ne s'imposent pas, mais s'installent », et qui n'hésite pas à partir en guerre contre le proviseur. Fait rare dans une série d'AB Productions, on a même droit, quelques secondes, à du silence : c'est Philippe qui rêve, qui souffre. Qui pense ?

ARIANE CHEMIN

Texas-night a écrit:

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Hi hi je vais en avoir plein

TF1 renonce à la nouvelle série d'AB Productions
Article paru dans l'édition du Monde 25.12.94
Première sitcom tournée en extérieurs, " Les Garçons de la plage " utilisaient les recettes qui avaient fait le succès d'" Hélène et les garçons ". Testée le 19 décembre, à 19 h 25, par TF1, après la chaîne belge RTL-TVI, la série n'a pas passé la rampe du deuxième épisode.

Ils se sont donné de gentils surnoms de gentils organisateurs (GO). Tiercé bronzé et viril du Club Hawaï, Pat, Tom et Mo sont les héros de la nouvelle sitcom " comédie de situation " télévisée fabriquée par AB Productions pour " l'unité de programmes familiaux Dorothée" de TF1. Les téléspectateurs au rendez-vous de 19 h 25, lundi 19 et mardi 20 décembre, ont pu juger la nouvelle série. Brièvement : faute d'audience, TF1 a en effet décidé de suspendre la diffusion des " Garçons ". Eau de rose et eau de mer, sentiments lisses qui se dorent au sable chaud : " Les Garçons de la plage " reprend les recettes qui ont fait le succès des précédentes séries de la maison - " Premiers baisers ", " Le miel et les abeilles ", " Hélène et les garçons " - en leur offrant la maturation de l'âge et du soleil. Car ces nouveaux héros ont plutôt trente que vingt ans. TF1, qui prévoit tout, avait choisi de " tester " cette nouvelle série ensoleillée en plein hiver, en comptant sur l'attrait du dépaysement. Courbe de hanche L'argument de la série est simple. A chaque épisode son " arrivage " de gentils membres (GM), que les trois bellâtres jaugent d'un coup d'oeil, en séducteurs à qui on ne la fait plus. Gros plan sur la courbe d'une hanche, contre-plongée et travelling des jambes aux lèvres, et voilà le téléspectateur qui devient le plus diligent des animateurs. Le scénario de l'épisode se dévoile en quelques minutes. Les trois rivaux sont inégalement chanceux, mais leurs querelles de machos tournent rarement au vinaigre. Des relents des Bronzés, film célèbre de Patrice Leconte, traînent dans cette série où errent des clones esseulés de Michel Blanc en mal d'amourettes. Crues, fausses, les images de studio accusent encore davantage l'ambiance kitsch et poisseuse des clubs de vacances. Mais, au-delà de cette "pâte" hexagonale, la volonté de parfaite ubiquité et d'intemporalité, propres aux séries d'AB Productions, se manifeste à nouveau. Nulle référence à l'actualité ou à l'ordre social dans les productions de Jean-Luc Azoulay et de Claude Berda : un récent épisode d'" Hélène et les garçons", où le personnage principal avait été drogué par une copine, vient ainsi d'être interdit de diffusion. Tissée de sentiments universels, la série doit éviter de s'ancrer dans le réel. Histoire de marquer une " évolution ", AB a toutefois troqué le trois pièces d'" Hélène " pour une demi-douzaine de lieux de tournage : bar, bungalows, local à parasols, bureau de la directrice, et même... plage et piscine, où les acteurs se risquent - autre progrès - en maillot de bain. TF1, de son côté, avait tenu à faire savoir que " Les Garçons de la plage " était sa première sitcom tournée " en extérieurs ". Pour faire riche, des vues prises d'hélicoptère offrent en effet d'inusables plans de coupe des plages hawaïennes, tandis que les caméras se risquent à suivre quelques balades amoureuses et sablonneuses, pieds dans l'eau. Las ? Comme le garage qui sert de confessionnal aux copains d'" Hélène ", le Club Hawaï n'est qu'un nulle part télévisuel. L'île qui sert de décor à la nouvelle sitcom joue une fois encore le rôle de no man's land. Les rires enregistrés, rappellent aussi, si besoin en était, qu'on est en pays cathodique. Le générique s'applique à copier la musique des Beach Boys, comme dans une autre série des années 60, " Happy Days ". Même les " guest stars" qui débarquent chaque semaine au club sont nées sur l'écran de TF 1 : on reconnaît ainsi, au fil des épisodes, un couple du " Miel et les abeilles", Rochelle Redfield, l'ex-copine de Cri-Cri d'amour dans " Hélène " (aujourd'hui présentatrice de . " Look ahead ", sur La Cinquième, Babsy, de " Salut les musclés ", Dominique Divin, présentatrice du " Juste prix "... Un auditoire mature " L'aventure est au coin de la rue ", diagnostiquaient Pascal Bruckuer et Alain Finkielkraut dans leur livre, il y a quinze ans (Le Seuil) ; avec " Les garçons de la plage ", le rêve et le Médiamat devaient se croiser chaque soir au coin de la pub. TF1 avait choisi cette recette pour prendre le relais de " Beverly Hills ". Diffusée depuis quelques semaines sur RTL TVI, la chaîne privée belge, une soixantaine d'épisodes étaient déjà en boîte, à 700 000 francs l'unité, grâce à une cadence d'enfer : vingt-six minutes par jour pour les scènes de studio (un peu moins pour les extérieurs) quand le cinéma ne tourne qu'une ou deux minutes " utiles " quotidiennes, et les séries télévisées classiques une quinzaine par jour. Présentée comme un " test ", la programmation de la série à 19 h 25, dans la tranche stratégique du "19-20", a fait long feu (le Monde du 23 décembre). Dès le deuxième épisode diffusé mardi 20 décembre, la direction de TF 1 a réagi : avant le journal de 20 heures, " Les garçons de la plage " n'ont pas réussi à fédérer une large audience. Les mesures d'audience par foyers, mais aussi par individus et par cible (notamment les ménagères de moins de cinquante ans) témoignent que la série n'a pas réussi à créer une ." promesse ", comme disent les programmateurs, c'est-à-dire à attiser la curiosité du télespectateur qui ne s'est pas rendu au rendez-vous. "Les Garçons" ont également subi une désaffection de l'audience d'un jour sur l'autre, mais aussi au cours de l'épisode. Réaction normale à la pauvreté des dialogues et de la réalisation et à la "beaufitude" des thèmes abordés, comme certains le laissent entendre à mots couverts à TF 1 ? " Les téléspectateurs sont parvenus aujourd'hui à la maturité, une qualité qui est liée à l'apprentissage d'un outil, la télécommande, commente un professionnel. " Comme eux, les chaînes réagissent de plus en plus vite. " L'aventure des " Garçons " prouve en tout cas que la programmation n'est pas une science exacte pour les grandes chaînes tous publics, le défi reste toujours de "faire des programmes généralistes au sein de télévisions commerciales qui doivent trouver des cibles marchandes".
ARIANE CHEMIN

Rasko, Question méthodologique : tu t'es abonné aux archives du monde ou quelque chose comme ça ? Comment peut-on déterrer des articles qui ont plus de 10 ans ?

TF 1 interrompt « Les garçons de la plage »
Article paru dans l'édition du Monde 23.12.94

Trop bêtes ? Trop machos ? Etienne Mougeotte, vice-président de TF 1, a décidé de suspendre, mercredi 21 décembre, « Les garçons de la plage », la nouvelle série d'AB Productions (« Premiers baisers », « Le miel et les abeilles », « Hélène et les garçons ») programmée depuis le... 19 décembre. Les trois « gentils organisateurs » (GO), héros du club de vacances Hawaï et de la nouvelle comédie de situation télévisée (sitcom), diffusée à 19 h 25, « n'ont pas rencontré le public de la tranche », explique-t-on pudiquement à la direction de TF 1 après deux jours de diffusion.
Sur la première chaîne française, le verdict du Médiamat s'impose chaque semaine avec davantage de brutalité. « Tout le toutim », animée tous les jeudis à 20 h 50 par Christophe Dechavanne, avait ainsi été « déprogrammée » un mois après la première émission (le Monde du 26 octobre). Cette fois, il aura suffi de deux séries de chiffres les audiences du lundi 20 décembre et du mardi 21 décembre pour que la décision s'impose à la direction de l'antenne : non seulement le nouveau programme n'attire pas les télespectateurs quittent la chaîne avant même le début de l'émission mais il ne fédère et ne fidélise pas. Retour, donc, à « Beverly Hills », la série américaine en cours depuis la rentrée. Pour Claude Berda, producteur des cinquante-deux épisodes des « Garçons de la plage » avec Jean-Luc Azoulay, la série « est un bon produit, que TF 1 saura programmer à une meilleure place ». A TF 1, on laisse entendre que la pauvreté de la réalisation et la vulgarité des dialogues échangés par les acteurs ne sont pas étrangères à cette décision.

ARIANE CHEMIN

Aza a écrit:

Rasko, Question méthodologique : tu t'es abonné aux archives du monde ou quelque chose comme ça ? Comment peut-on déterrer des articles qui ont plus de 10 ans ?

J'ai accès à toute la presse en ligne !

C'est bon ça pour un article sur Les garçons de la plage pour le blog.

Citation :

A TF 1, on laisse entendre que la pauvreté de la réalisation et la vulgarité des dialogues échangés par les acteurs ne sont pas étrangères à cette décision.

TELEVISION JEUDI 24 FEVRIER ENVOYE SPECIAL : FRANCE 2, 20 h 50 Un modèle nommé Hélène
Article paru dans l'édition du Monde 20.02.94
L'un des reportages d'" Envoyé spécial " tente d'analyser le phénomène " Hélène ". Rencontre entre un système de marketing efficace et un principe d'identification vieux comme le monde.


DANS la vie, elle aime la campagne, les animaux et la tranquillité. Dans son métier, elle s'expose à des milliers de gens qui l'aiment sans trop savoir pourquoi. Ses fans la trouvent jolie, simple et gentille, à l'image de son personnage dans la série qui l'a fait connaître. Chez les jeunes, la méprise est totale. Pour eux, ni différence ni frontière entre la fiction et le réel : Hélène est bel et bien une jeune fille " comme les autres ", une copine capable d'être à leur écoute, une adolescente qui partage les mêmes problèmes qu'eux. " Les enfants ont du mal à se situer dans la réalité et dans le temps, remarque Béatrice Happe, une enseignante qui, en dix ans, n'avait jamais vu un tel engouement pour une série. Avec Hélène, il y a confusion entre ce qu'ils voient ou entendent dans le feuilleton et ce qu'ils lisent sur elle dans les magazines. C'est difficile de leur expliquer que ce n'est qu'un personnage. En plus, elle porte le même nom dans la réalité et à l'écran. "
De son côté, Hélène, malgré elle, soutient l'ambiguïté. Son copain dans la vraie vie est celui du feuilleton. Sur scène, elle n'a pas vraiment l'impression de participer à un spectacle mais plutôt de " faire la fête " avec son public.

Le principe d'identification n'a donc guère de mal à fonctionner. Les jeunes trouvent en Hélène un modèle de vie heureuse, et leurs parents le type de fille qu'ils auraient aimé avoir. Face à elle, le conflit des générations disparaît, réconciliant tout le monde. " Hélène et les garçons " : c'est très moraliste, ce qui explique en grande partie son succès et notamment son succès familial ", constate Dominique Pasquier, sociologue au CNRS. Pour elle, la série est une " éducation sentimentale télévisée " qui donne une " vision très traditionnelle des rôles sexuels. On voit Hélène recoudre les boutons de la chemise de Nicolas et Nicolas déboucher la baignoire d'Hélène ", explique l'analyste qui a minutieusement étudié une centaine d'épisodes et a adressé des questionnaires dans les lycées. " Les garçons ont un physique presque androgyne, avec des visages doux et longs. Les étreintes sont des calins (...) Les tout-petits peuvent croire que faire l'amour, c'est simplement s'embrasser sur la bouche. On est plus proche de la tendresse que de la pulsion sexuelle. Cela rassure. "

Sur TF 1, " Hélène et les garçons " a battu tous les records d'audience, réussissant à battre les scores réalisés par les séries américaines. Hélène la chanteuse est, quant à elle, parvenue à vendre un million de disques compacts, sans promotion radio. La jeune fille ne se considère pas pour autant comme un phénomène. " C'est ce qu'il y a autour, l'image qu'on projette, dit-elle, qui est un phénomène. Pas moi. " Or, " ce qu'il y a autour ", elle le doit à Jean-Luc Azoulay, producteur de AB Productions (" Club Dorothée ", " Jacky show ", " Les filles "...) et grand spécialiste des sitcoms qui collent à l'air du temps. Avec le " Club Dorothée ", AB Productions fabrique d'abord des idoles. Hélène en est un exemple flagrant, même si Jean-Luc Azoulay refuse de livrer quelque analyse que ce soit de son système marketing. Inutile, selon lui, de compliquer les choses simples. Le public voulait seulement " des chansons tendres, une histoire d'amour et un feuilleton pour respirer ". Il leur a donné " Hélène " et la recette a fonctionné.

Le produit rapporte beaucoup d'argent. Et la source est aujourd'hui loin d'être tarie. Le producteur vient en effet de signer des contrats avec plusieurs pays d'Amérique latine, pour l'exportation de la fiction. Les Anglais voient en cette jeune fille la nouvelle Bardot. Dans les studios de la Plaine-Saint-Denis, on tourne, en allemand et en anglais, avec des acteurs des pays correspondants, les versions destinées à l'Allemagne et aux Etats-Unis. Hélène est bel et bien un phénomène... mais _ comme le montre le reportage de Marie-Pierre Farkas et Philippe Luzzi _ un phénomène d'abord et avant tout commercial.

CAUHAPE VERONIQUE

DOSSIER COMMENT APPRENDRE LA TELEVISION AUX ENFANTS 3/ Exercice : le décodage du " Club Dorothée "
Article paru dans l'édition du Monde 19.12.93
Mère de trois filles, Elisabeth Baton-Hervé fait partie des parents qui pensent que, plutôt que de contrôler l'usage que les enfants font de la télévision, il vaut mieux leur apprendre à la décoder, à la regarder sans être dupe des manipulations, voire des mystifications auxquelles donnent parfois lieu certaines des émissions spécialement destinées au jeune public, surtout lorsqu'elles ne sont que prétextes à opérations commerciales. Après avoir consacré un mémoire à l'" exemple " du " Club Dorothée " pour illustrer une étude sur " l'intention de communication dans l'émission pour la jeunesse ", cette chercheuse poursuit ses travaux en effectuant une thèse de doctorat en sciences de l'information et de la communication à l'université Rennes_II.

POURQUOI avoir entrepris cette analyse des émissions du " Club Dorothée " ?

[R]_ J'avais constaté l'existence d'un paradoxe : généralement, on se préoccupe beaucoup des effets de la télévision sur le comportement des enfants, mais beaucoup moins du contenu des espaces-temps que la télévision propose à la population enfantine à travers les émissions dites " pour la jeunesse ". A travers l'étude de cas du " Club Dorothée ", dont les émissions bénéficient de la plus large notoriété, c'est tout le concept d'émission " pour la jeunesse " que j'ai voulu étudier. Sans formuler de jugement de valeur.
Plusieurs outils " Mon hypothèse de départ était la suivante : une émission " pour la jeunesse " est une situation de communication dans laquelle l'initiative appartient à l'" émetteur ". Celui-ci construit un message précis et déterminé dont le sens n'est pas repérable d'emblée par le " récepteur ". Entre ce qui est censé donner prétexte à l'émission et sa finalité, il existe un écart notable. Mon objectif était de rechercher, au-delà du message manifeste, le message latent. " Je m'y suis employée en recourant à plusieurs outils : la sémiologie (la science des signes), la psychanalyse (pour la simple raison que les publicitaires y font eux-mêmes appel dans le but d'atteindre l'inconscient du " récepteur "), l'analyse filmique (pour mieux démonter les images, les prises de vues, les agencements séquentiels, rien de tout cela n'étant neutre) et la rhétorique (parce que la télévision offre une forme particulière de discours). Et, surtout, en passant des heures et des heures à regarder la télé, seule ou en compagnie de mes filles, à participer aux jeux du " Club ", etc.

[Q]_ Est-ce que votre hypothèse s'est trouvée vérifiée et à quelles conclusions êtes-vous parvenue en l'état actuel de vos travaux ?


[R]_ Je me suis très vite rendue compte que pour les " émetteurs " du " Club Dorothée " les enfants n'étaient que des cibles, des parts de marché, à la fois consommateurs et prescripteurs de consommation pour leurs parents. Ces émissions " pour la jeunesse " s'articulent de telle sorte _ dans un enchaînement précis de publicités en tous genres (patentes, clandestines ou suggérées), de bandes annonces, de fictions mettant en scène de la consommation, de jeux de plateaux agencés pour donner une unité à travers la diversité _ que tous leurs composants tendent à un seul but : créer un environnement favorable à un ou plusieurs messages publicitaires, utiliser tous les moyens, la séduction, la fascination, la persuasion, pour captiver une clientèle à fidéliser. Tout cela forme un modèle de communication publicitaire.

Des procédés sophistiqués

[Q]_ Pouvez-vous donner quelques exemples ?

[R]_ A côté des écrans publicitaires clairement identifiés, il existe des formes de publicité moins ostensibles mais tout aussi efficaces parce qu'elles sont intégrées, par exemple, dans les dessins animés. Ce genre de procédé est utilisé par la firme japonaise qui a produit " Nicky Larson ", diffusé par TF 1 au printemps 1991. On a vu à trois reprises, au milieu d'un épisode, de la publicité pour un appareil photographique de marque Nikon. D'abord un lent panoramique permet de diriger le regard du téléspectateur sur l'appareil en question, tenu par l'un des héros du film. Puis un très gros plan de quelques secondes, en parfaite synchronie avec la bande son qui dit qu'" il ne s'agit pas d'un appareil comme les autres ". La démonstration suit : dans un combat entre deux protagonistes, l'objet tombe mais ne se casse pas, " preuve " qu'il ne craint pas les chocs. Avec, à deux reprises, un gros plan de l'index sur le déclencheur pour laisser supposer une manipulation facile. " Dans le même genre de procédé filmique, je pourrais parler aussi de la promotion discrète des bonbons M & M's, dont la publicité apparaît parfois sur une sorte de grille-pain posé à même une table de petit-déjeuner bien garnie : lent panoramique puis arrêt en gros plan sur l'objet. " Un autre procédé, plus sophistiqué, consiste à suggérer certaines marques commerciales. Les friandises M & M's sont alors présentées de façon plus dissimulées, par une mention sur un sac à provisions ou sur un panneau publicitaire de ville dans le décor du dessin animé. Le cadrage ne permet pas de lire la totalité de la marque mais simplement M &..., le reste du nom étant laissé hors du champ. Ou, sur un appareil photo, au lieu de lire " Canon ", on peut lire " Camon ". Ce recours au métagramme relève de la cryptographie. Tandis que le fait d'induire l'appellation M & M's procède d'une figure de style consistant à prendre la partie pour le tout : la synecdoque. " Le contenu des émissions obéit ainsi à des codes très variés. L'environnement télévisuel dans lequel s'insère la publicité est loin d'être négligé par les annonceurs. Il est, au contraire, le terrain favorable à tout message publicitaire. Voilà pourquoi les enchaînements sont, eux aussi, très signifiants...

[Q]_ Signifiants... de quoi ?

[R]_ Avez-vous remarqué que, dans l'émission de Dorothée, avant toute coupure publicitaire au cours d'une fiction, il y a toujours un bref retour sur le plateau, un retour panoramique sur les jeunes spectateurs ? Je ne crois pas que ce procédé soit neutre. D'une part, cela doit agir comme repère pour le téléspectateur. Revenir au plateau, c'est à nouveau donner la référence de la chaîne sur laquelle il se trouve. D'autre part, cette masse d'enfants filmée est un support d'identification. Ils symbolisent la masse des téléspectateurs qui, comme eux, regardent le " Club Dorothée " ; qui, comme eux, vont voir la publicité. Enfin, si l'on fait confiance à Dorothée, ne peut-on faire confiance à tout ce qui est diffusé dans son émission ? Ce rapide retour au plateau est d'une certaine façon un moyen d'accréditer et de légitimer la publicité qui s'annonce.

La présentation d'un modèle de société " Il faut aux annonceurs et publicitaires un créneau pour atteindre la population que représente la jeunesse, les émissions pour le jeunesse sont un chemin tout tracé pour y parvenir et le " Club Dorothée " la voie royale. Ces " clients-enfants-jeunes " sont à la fois consommateurs et prescripteurs pour le présent et pour l'avenir. Au-delà des motivations publicitaires primaires, l'émission de Dorothée permet la promotion directe d'objets et la présentation d'un modèle de société où l'avoir est une source de plaisir incontestable, où des styles de vie sont institués, où les valeurs afférentes à la société de consommation sont retenues comme primordiales. " On retrouve une synthèse de tout cela, aujourd'hui, dans les composants d'" Hélène et les Garçons ", le dernier en date des feuilletons à succès de la société AB Productions, en charge de l'unité jeunesse de TF 1, dont Dorothée est le fleuron.

[Q]_ Il n'en demeure pas moins, si l'on en juge par les enquêtes d'opinion, que les émissions du " Club Dorothée " plaisent beaucoup aux enfants. Est-ce uniquement parce qu'elles savent divertir ou parce qu'elles contiennent également, malgré tout, une part éducative ?

[R]_ Pour l'instant, je réserve ma réponse. Je veux d'abord étudier plus complètement les réactions des enfants eux-mêmes. Je vais le faire avec le laboratoire de psychologie expérimentale de l'université Rennes_II. De toute façon, il est clair que Dorothée ne poursuit pas un but éducatif. Elle le dit honnêtement elle-même quand on l'interroge à ce sujet : elle se réserve la fonction de divertissement et laisse aux autres la fonction d'éducation. Le problème réside peut-être dans le fait qu'en répétant trop cela on risque de rendre le divertissement et l'éducation antagonistes.

Méthode américaine

[Q]_ Parmi les pratiques du " Club Dorothée " qu'il lui est arrivé de juger " inadmissibles " dans la mesure où elles s'apparentent à une " exploitation de la confiance, voire de la naïveté du jeune public ", le CSA a dénoncé la multiplication des opérations promotionnelles auxquelles l'émission semble parfois servir d'alibi. Par exemple, la promotion des spectacles des animateurs ou celle des produits dérivés des séries, disques, cassettes vidéo, etc. Faites-vous le même constat ?

[R]_ Dorothée et son équipe ne manquent jamais une occasion d'auto-promotion. Il y a quelques semaines, les jeunes téléspectateurs étaient vivement incités à aller applaudir Hélène, le clone de Dorothée, qui faisait ses débuts de chanteuse avant de partir en tournée en province. En cette période de fêtes, tout est orchestré, au fil des émissions du " Club ", concours à l'appui, pour que toute la population enfantine soit au rendez-vous des concerts dont Dorothée sera elle-même la vedette, en janvier, à Bercy. " Mais la société AB Productions s'inspire simplement de la méthode américaine de production qui consiste à démultiplier les séries suivant un système très simple : on crée une série autour d'un personnage dont on fait une vedette, puis une star. Ensuite, on choisit un autre personnage de cette série pour en faire la vedette d'une deuxième série et l'on en fait une deuxième star. Exemple : le personnage de Justine, la nièce des Musclés dans " Salut les Musclés ", est l'héroïne de " Premier baiser ", la série dans laquelle Hélène joue la soeur de Justine avant d'être, à son tour, l'héroïne d'" Hélène et les Garçons ". Mais Justine et Hélène ont une cousine commune, Lola, qui n'est autre que l'héroïne de " Le Miel et les Abeilles "...

Gaëlle et Bécassine " Il y a eu une autre évolution. Avant, le " Club " recevait souvent des invités extérieurs. Maintenant, toutes ses vedettes et ses stars s'autocongratulent et s'autopromotionnent en se recevant mutuellement sur les différents plateaux des mêmes studios. La boucle commerciale est bouclée : tout part du même et tout revient au même, sans ouverture à l'extérieur, jusqu'à une certaine ségrégation. " Et au-delà des apparences inoffensives, ces feuilletons distillent des clichés. Ainsi, un jour, Bénédicte, une amie d'Hélène, présente sa cousine Gaëlle à son groupe d'amis. Gaëlle arrive de Bretagne. Bénédicte la rassure : " Nous allons faire de toi une vraie Parisienne. " Cette scène rappelle évidemment Bécassine. " A travers cet exemple se profile une manière de penser les relations sociales en termes de hiérarchie : c'est la prédominance de la capitale sur la province comme, ailleurs, c'est toujours la prédominance de Paris sur la banlieue, de l'Amérique sur l'Europe. Un code conservateur pour rassurer le public familial.

[Q]_ Quels conseils donneriez-vous à des parents inquiets de voir leurs enfants fascinés par de telles émissions ?

[R]_ Le meilleur conseil qu'on puisse donner est d'encourager à l'apprentissage de la lecture des images pour qu'il y ait de plus en plus de téléspectateurs responsables, sachant avoir un regard critique. Pour ma part, j'essaie de fournir quelques clés en ayant bien conscience que nous ne sommes qu'aux débuts de la compréhension des phénomènes télévisuels.

[Q]_ Et avec vos clés vous obtenez déjà des résultats ?

[R]_ L'autre jour, la plus jeune de mes filles m'a dit, après avoir regardé une émission : " Maman, je viens de voir Dorothée ; elle était présentée dans un coeur. C'est pour faire croire qu'on l'aime bien ? " En disant cela, elle avait déjà un certain recul. Je me suis dit qu'elle avait compris l'essentiel. "

ROLLAT ALAIN

France 2 et TF 1 rivalisent sur les séries « jeunes »
Article paru dans l'édition du Monde 03.03.95
Pour attirer à 19 heures le plus grand nombre possible de téléspectateurs les chaînes recherchent de gentilles histoires d'adolescents

LE 21 DÉCEMBRE 1994, deux jours après son lancement, TF 1 décidait de déprogrammer la nouvelle sitcom d'AB Productions, « Les Garçons de la plage ». Présentée comme un test, la diffusion de la série à 19 h 25 dans la tranche stratégique du 19-20 n'avait alors pas réussi à fédérer une assez large audience. « Les Garçons » ont droit à une seconde chance puisque les programmateurs de la Une les ont, depuis le lundi 27 février, réinstallés sur leur grille, à 17 h 35, un horaire dont les enjeux sont nettement moins importants que ceux véhiculés par l'avant-20 heures.
Mais qu'on ne s'y trompe pas. Même si « Les Garçons » n'occupent plus la place de l'access prime time, ils vont devoir s'affirmer face à la série de France 2, « Seconde B » (17 h 15), qui, elle, connaît depuis un an et demi un véritable succès auprès des adolescents. De plus, la reprogrammation de la série d'AB Productions est loin d'être un acte isolé. Elle apparaît au contraire, aujourd'hui, comme un des chaînons du plan de réaménagement global de la grille de TF 1, sur ses fins d'après-midi. Une plage où s'enchaînent désormais les séries à succès.

La diffusion à la suite des « Garçons de la plage », de « Premiers baisers » (18 h 05), du très populaire « Miracle de l'amour » avec Hélène, l'égérie des préadolescents (18 h 30), devrait permettre de faire progressivement le plein de téléspectateurs. Ce fameux public que TF 1 entend bien amener jusqu'à l'émission de Christophe Dechavanne, « Coucou » (19 heures) qui, selon la chaîne et les derniers sondages, « confirme sa remontée d'audience » et diminue l'écart avec l'émission concurrente de France 2, « Studio Gabriel ».

Les séries destinées aux jeunes présentent pour les chaînes le double avantage de fidéliser les téléspectateurs et de drainer un public qui est la cible privilégiée des annonceurs publicitaires. Chaque année, on voit ainsi apparaître des productions standards et des personnages édulcorés censés offrir aux adolescents le reflet simplifié de leur image et un modèle idéalisé de leur vie. Programmées à des heures où les habitudes d'écoute sont « hachées » et « distraites », ces séries sont construites sur des formats courts. En fin de journée, au moment où les Français rentrent du travail et les jeunes du lycée, Il faut distraire, faire vite et simple.

Programmée chaque samedi, depuis le 11 février, à 18 h 05, sur France 2, la série « Hartley coeurs à vif » a le mérite de casser ce modèle. Cette fiction qui met en scène les élèves et les professeurs d'un lycée, a en effet pour principe de ne rien cacher des réalités (affrontements, révoltes, problèmes de drogue, de racisme, d'alcoolisme...)auxquelles peut être confronté ce genre d'établissement scolaire (Le Monde du 11 février). Ce mérite ne semble pourtant pas séduire le jeune public français, probablement encore réticent au caractère rude et parfois agressif de la série australienne.

En réalisant 17,8 % de parts de marché pour le premier épisode, 12,2 % pour le deuxième et 12,6 % pour le troisième (contre une moyenne de 34 % de parts de marché pour « 30 millions d'amis », sur TF 1), « Hartley coeurs à vif » ne suscite visiblement pas l'engouement qu'il a provoqué, dès ses premières diffusions, en Australie, en Angleterre et en Allemagne (Le Monde du 11 février 1995). En revanche, la série a permis à France 2 de doubler son audience sur les 15-24 ans et de progresser sur les 15-34 ans. Un résultat qui autorise la chaîne à demeurer confiante.

Parallèlement à cette programmation du samedi, France 2 installe sur son antenne deux séries américaines : « Viper », 13 épisodes de 46 minutes, diffusés chaque mercredi à 15 h 30, et « Code Lisa » (26 épisodes de 26 minutes), proposés du lundi au vendredi, à 17 h 45.

France 2 et TF 1 continuent leur bataille, l'oeil rivé l'une sur l'autre, peaufinant au fur et à mesure leur grille en fonction de leur voisine. Une bataille qui brouille les pistes, réduit toujours plus la frontière entre les objectifs commerciaux et les fonctions du service public. Une bataille qui donne aux jeunes téléspectateurs doit-on s'en réjouir ? l'embarras du choix entre des produits somme toute assez similaires.

VERONIQUE CAUHAPE

Hélène est revenue sur TF 1
Article paru dans l'édition du Monde 14.03.95

D'APRÈS LES LETTRES reçues par les responsables de TF 1 et de la maison de production, les fans d'Hélène, l'héroïne d'une série télévisée, attendaient son retour avec impatience. Aujourd'hui, ils doivent être rassurés. Lundi 20 février, la jeune fille blonde et sa bande de copains ont retrouvé leur place quotidienne sur la chaîne privée, qui diffuse désormais, à la suite, quatre sitcoms en provenance d'AB Productions : « Le Miel et les abeilles » (16 h 15), « Les Garçons de la plage » (17 h 30), « Premiers baisers » (18 h 05) et... « Le Miracle de l'amour » (18 h 30).
De « Hélène et les garçons » on est donc passé au « Miracle de l'amour ». La différence sémantique n'est pas énorme ; elle a néanmoins un sens. Si le titre de la première série se contentait de suggérer l'amour, celui de la deuxième série le nomme franchement. C'est que les héros de cette fiction ont vieilli. Ils ont décidé de vivre ensemble, de partager, à sept, la même maison.

Les préoccupations de la bande d'Hélène sont donc toujours les mêmes, les problèmes tels que le chômage ou la drogue toujours exclus. Seuls les décors ont changé. La cafétéria a été « rafraîchie », les garçons ont un autre local pour répéter et la maison (quatre chambres, un grand salon, des salles de bains, deux garages) offre un espace plus vaste que celui d'autrefois. Les couleurs prédominantes demeurent fidèles aux pastels. Des teintes chaudes, douces et claires, à l'image, en somme, de l'univers dans lequel vivent ces personnages jeunes, des héros forcément beaux et sans réels soucis.

rasko a écrit:

Les couleurs prédominantes demeurent fidèles aux pastels. Des teintes chaudes, douces et claires, à l'image, en somme, de l'univers dans lequel vivent ces personnages jeunes, des héros forcément beaux et sans réels soucis.

Ouai mais ils mentent, ca parle quand meme de drogue et de viol dans H&G ^^

Le nouveau sitcom de France 2
Article paru dans l'édition du Monde 06.10.96

La chaîne publique diffusera à partir de la mi-décembre « La vie d'artiste », un nouveau sit-com produit par AB Productions qui raconte la vie d'une poignée de jeunes élèves de province dans une école de comédie. Une première série avait été diffusée cet été sur TF 1, sous le titre « L'école des passions ». L'unité fictions de France 2 entreprend le tournage de soixante-cinq nouveaux épisodes de vingt-six minutes. Un gros travail d'écriture confié à une équipe de scénaristes parmi lesquels Xavier et Mariemm Florent, fils et belle-fille de François Florent, fondateur des cours du même nom.

Démarrage difficile d'« Un homme à domicile »
Article paru dans l'édition du Monde 23.07.95
Fournisseur attitré des programmes jeunesse de TF 1 et grande spécialiste des sitcoms, AB Productions vient de livrer au service public une série pour fin d'après-midi. Le succès n'est pas au rendez-vous


FRANCE 2 a inauguré les sitcoms en France avec « Maguy ». Elle est ensuite restée fidèle à ce type de fiction, offrant régulièrement aux téléspectateurs des comédies de situation (« Les Gromelots et les Dupinsons » étant la dernière du genre) et des séries proches du genre (« Seconde B », « Hartley coeurs à vif »). La chaîne de service public, qui a l'intention d'accroître ses investissements dans ce type de production (qui permet de fidéliser un public pour un coût réduit) vient de faire appel à la plus importante des sociétés de production spécialisées dans le genre : AB Productions. Fournisseur attitré des programmes jeunesse de TF 1, (« Premiers baisers », « Hélène et les garçons » et autres « Miracle de l'amour »), celle-ci n'avait jusque-là jamais « livré » de comédie de situation à France 2. La collaboration a donc valeur de symbole. Mais « Un homme à domicile », programmé chaque jour (du lundi au vendredi) à 18 h 50, depuis le 3 juillet, dépasse rarement les 2,3 % d'audience (ce qui représente environ 11 % à 12 % des parts de marché). Un score en baisse par rapport à la série qui précède, « Sauvés par le gong », sur la même chaîne. Embêtant.
L'été, une période-test « Fédérateur et intergénérationnel », selon les termes du directeur d'antenne de la chaîne, Louis Bériot, « Un homme à domicile » ne vise pas seulement les adolescents la cible privilégiée des sitcoms mais le public familial susceptible d'être devant le petit écran à 18 h 50. On trouve donc, dans cette série « bon enfant », une palette de personnages âgés de 7 à 77 ans, à l'image de l'éventail des téléspectateurs qu'elle veut séduire.

Divorcée depuis six mois, Elisabeth mène de front sa carrière de médecin et l'éducation de ses trois enfants, Élise (dix-sept ans), Marie (douze ans) et Gédéon (huit ans). La jeune femme subit régulièrement les intrusions de sa mère, Estelle, une sexagénaire extravagante qui amène dans le foyer son grain de folie. Il y a aussi un jeune homme sans domicile fixe, recueilli un jour d'hiver par Marie. Tout ce petit monde cohabite dans une bonne humeur que les soucis de la vie quotidienne ne parviennent pas à réellement ébranler.

A partir de cette trame, les scénaristes ont imaginé, pour chaque numéro, des histoires cocasses et des retournements de situation qui ont le mérite de faire rebondir l'action sans porter atteinte au schéma initial. On s'amuse des bons mots échangés par les personnages et des scènes qui les placent dans des postures ridicules. Ces quelques trouvailles suffisent à créer une dynamique à l'intérieur de chaque épisode, mais pas d'un épisode à l'autre. Et même si on se laisse piéger par quelques plaisanteries faciles, le plaisir est en partie gâché par les rires enregistrés...

Ces faiblesses n'ont pas échappé aux responsables de la fiction de France 2. Globalement séduits par les trente premiers numéros fournis par AB Productions ils en ont notamment apprécié la qualité des dialogues et les comédiens , ils comptent corriger les défauts qui, selon eux, creusent « l'écart entre la réalisation fournie et la ligne éditoriale de la chaîne ». C'est pourquoi ils ont décidé de retravailler les scènes en cours de tournage. « Nous avons notamment constaté que cette production reposait surtout sur un comique de répliques, et non, comme savent le faire les Américains, sur de véritables situations. Nous allons donner plus de densité aux personnages et apporter plus de soin à l'action », précise Claude Chauvat, conseiller des programmes pour la fiction sur France 2.

Selon Louis Bériot, « Un homme à domicile » ne sera reconduit à la rentrée que si l'audience s'améliore. L'été constituera une période-test pour ce rendez-vous familial dont on ne peut pas dire qu'il bénéficie de toutes les chances. On peut, en effet, se demander si la période estivale, plus propice au « farniente » en terrasse ou sur les plages, est le meilleur moment pour fidéliser un public.

Merci pour tous ces articles. Toutes ces analyses poussées me rappellent un peu la profusion d'articles sur le Loft 1 à sa sortie.
Sinon pour la DROGUE ( c'est sale) ce qui est marrant, c'est que quand elle est abordée, c'est pas avec le dos de la cuiller: genre quand Cricri d'amour bascule du côté obscur, il fume pas un spliff ou deux,il se fait des shoots d'héro (alors que le gars carbure au diabolo menthe...), quand Manu-chouineur se fait embarquer dans un trafic de drogue il se pointe pas avec 3 grammes de coke dans un tube d'aspirine, mais avec un sac de sport (ils ont été cons de le rapporter d'ailleurs) et Hélène ne sniffe pas de la colle, elle se tape un space cake pendant que Fava se fait des tiroirs de cocaïne. Mais bon fava c'est un dépravé y'a qu'à voir comme il fume pendant un enregistrement

Comment apprendre l'intolérance aux enfants
Article paru dans l'édition du Monde 01.01.95

Etudiante de vingt ans, j'ai eu le loisir de regarder en septembre les programmes de fin d'après-midi destinés aux jeunes enfants. Ayant constaté que ces émissions sont rarement commentées par les critiques de télévision, je me suis livrée à une modeste «étude» avec l'intention d'attirer votre attention et celle des lecteurs du Monde sur l'intolérance régnant dans les feuilletons d'AB Production diffusés dans les programmes familiaux de Dorothée sur TF1.
Cette intolérance est véhiculée de manière très simple, notamment dans des séries comme «Le Miel et les Abeilles» et «Les Filles d'à côté».

L'un des héros de la première série se nomme Jancoucou (?) ; on le décrit rapidement : il est nain, laid, et curieusement... noir (le seul de toutes les séries AB). Parallèlement à ces traits physiques qui rompent avec la norme des silhouettes de type mannequin blanc présentes dans ces séries, le personnage Jancoucou a aussi la caractéristique d'être très bête (exemple d'une de ses répliques : «C'est où l'est de la France ?», de fonctionner de manière très primaire : il casse tout, mange beaucoup et salement, refuse de dormir dans un lit et est très jaloux.

Dans «Les Filles d'à côté», l'un des personnages est une jeune fille obèse qui poursuit de ses assiduités un des héros à qui elle fait d'ailleurs très peur. Fait surprenant, elle est aussi très bête. Gérard, un des autres héros, est, lui, homosexuel. Evidemment, il lui a été attribué toutes les caractéristiques des personnages de la Cage aux folles : il est très émotif et donc souvent ridicule.

Chaque réplique ou attitude de la jeune fille obèse et de l'homosexuel est saluée par des rires préenregistrés. On pourra rétorquer que ces rires sont au deuxième degré, mais est-ce que les jeunes spectateurs le perçoivent ainsi ? Non, ces rires expriment un message clair : la différence va de pair avec la bêtise.

On sait par ailleurs que l'équipe de TF 1 chargée de visionner les programmes avant leur diffusion a récemment censuré des épisodes d'«Hélène et les garçons» dans lesquels Hélène sombrait dans la drogue sous le prétexte que celle-ci se débarrassait trop vite et trop facilement de sa dépendance.

Ainsi, si le manque de réalisme de certains épisodes provoque la censure, l'intolérance la plus vile est admise.

Reprocher aux séries AB leur nullité est donc un mauvais angle d'attaque. Ces séries ne sont pas vides de sens : elles véhiculent tout simplement une attitude antinomique à toute formation civique : l'intolérance et ce, d'une manière particulièrement biaisée puisqu'elles s'adressent à un public qui, du fait de son jeune âge, n'est pas préparé à exercer un regard critique et à prendre du recul par rapport aux fantasmes et aux intentions des auteurs.

MURIEL BERNARDIN

IMAGES Hélène et Hélène
Article paru dans l'édition du Monde 07.05.93

JEAN-PIERRE Foucault recevait Hélène. Hélène, de " Hélène et les garçons ", le feuilleton à succès de TF 1. Plus précisément, Foucault recevait la jeune comédienne qui joue son rôle, Hélène Rolles. Nouvelle idole des cours de récréation, on attendait que la comédienne collât à son personnage. On attendait de la fraîcheur de commande, des enjouements pastel, un verre de diabolo-enthousiasme. En un mot, on attendait qu'Hélène ressemblât à Hélène. Surprise : Hélène semblait accomplir le service minimum. Alors qu'à côté d'elle une autre héroïne de feuilleton s'appliquait à " parler télé ", les réponses d'Hélène étaient polies mais brèves, ses sourires millimétrés, on sentait qu'au lieu de venir chez Foucault elle serait restée sans déplaisir chez elle, avec un bon livre, et dodo à 10 heures.
Hélène est donc en retrait sur Hélène. On sent Hélène coincée par le personnage d'Hélène, par le succès d'Hélène. On ne serait pas surpris que la nuit, Hélène rêve parfois d'étrangler Hélène, cette Hélène tellement envahissante. Certes, Hélène semble encore loin du stade de la haine consciente. Mais on crut tout de même entrevoir, entre Hélène et Hélène, une faille qui pourrait bien devenir fissure. Il ne nous étonnerait pas que la relation d'Hélène et d'Hélène tournât bientôt au moins à la mélancolie, au pire au tragique. Bien exploitée, cette faille entre Hélène et Hélène ne devrait cependant pas nuire au feuilleton. Au contraire. D'abord, si elle devait véritablement s'élargir, elle doublerait le feuilleton d'un autre feuilleton parallèle, dans les magazines spécialisés et les émissions auto-promotionnelles de TF 1. Jusqu'à quand Hélène va-t-elle supporter Hélène ? Il y aurait de l'eau dans le gaz entre Hélène et Hélène. On a vu Hélène sortir seule, sans Hélène, etc. Mais surtout, cette sourde réticence de la comédienne par rapport à son personnage délivre comme un certificat d'authenticité au " phénomène de société " que représente le feuilleton. Elle en atteste, d'une manière bien plus irrécusable que les communiqués de victoire de TF 1, le caractère spontané, ni fabriqué ni prémédité. Elle souligne bien que la gloire d'Hélène est tombée comme une foudre divine sur les frêles épaules d'une jeune artiste anonyme, qui n'avait rien sollicité, et en supporte le poids sans joie, presque dans la douleur. Elle permet à Foucault de conclure l'entretien avec Hélène par ces mots, qui sont sans doute une bonne part du succès du feuilleton : " En tout cas, vous êtes la preuve que tout le monde peut un jour réaliser ce rêve ! "

Merci Rasko pour les articles ! J'ai tout lu et effectivement comme dit plus haut ça fait beaucoup penser à la déferlante liée au Loft 1...

Les journaleux et autres psy se sont quand même fait pas mal de soucis pour nous, la jeunesse des 90's !!!

Ca me fait toujours un peu pitié la manière dont ces soi-disant élites nous prennent pour des cons, nous les franchouillards qui avalent tout ce que la télé raconte.. Comme si à 7 ans, on captait les histoires de drogue, de cul ou de racisme et comme si à 30 ans, à la même époque, on croyait que le nuage radio actif de Tchernobyl avait stoppé net devant la frontière Française... !

Ralàlà, ils sont magnifiques

Bonjour à tous

Je savais pas où parler de ce sujet..
L'autre jour, j'ai revu Un jour un destin sur France 2 sur Mme Claude qui était passé l'an dernier et là qu'entends-je :
" Mme Claude pris en 1992 de nouvelles filles dont une actrice connue de sitcom ...."

Je me demande bien de qui il pourrait s'agir ...

Article sur les débuts des stars dans les sitcoms AB :

Wow il y a encore des articles à ce sujet ? Le filon AB est toujours pas prêt de se tarir !